vendredi 10 juillet 2009

Mohamed Arezki Himeur ( un reporter-journaliste au village)


Ici, c'est la paix. Il n'y a ni bruit, ni pollution, ni klaxons des automobilistes, ni crissements des pneus, ni cris bruyants des enfants à la sortie de l'école ou dans les cages d'escaliers, ni sirènes hurlantes des ambulances et des voitures de la police et des pompiers.
Ici, les seuls "bruits " qu'on entend sont les doux chants des oiseaux, le frottement des feuilles d'arbres, les brindilles craquant sous vos pieds, les battements de votre cœur et votre respiration. Une virée matinale quotidienne à travers ses sentiers, y a pas mieux pour éviter de rendre visite au toubib.

Un texte et une image qui disent mille mots : des mots écrits par Mohand Arezki Himeur (je ne sais si vous le connaissez ou non), mais je vous laisse le soin de le découvrir à travers cette interview tout en le remerciant d’avoir pris le temps d’y répondre à mes questions.

Question 01 : vous êtes?

Je m’appelle Mohamed Arezki Himeur. Je suis né le 07 janvier 1947 (je précise la date pour ceux qui voudraient me faire un cadeau un jour, s’est-on jamais). J’ai fait, comme tous les enfants du village, l’école coranique. J’ai fréquenté pendant quelques mois l’école primaire française du village. L’établissement a été ensuite saccagé au début de la lutte d’indépendance par les moudjahidine, obligeant du même coup l’enseignant à quitter le village.

Et puis, la guerre s’installe dans toute son atrocité, son horreur. Des Ratissages, des militaires qui fracassaient les portes des maisons, des corps sans vie des moudjahidine du village ou d’ailleurs ramenés à dos d’âne, des fouilles régulières des maisons tantôt le jour tantôt la nuit, des regroupements des habitants sur la placette de taqaâts lekhmis, des brimages, des bastonnades, l’installation de trois casernes au village, exactions des militaires sur les hommes et les femmes, les arrestations arbitraires et les liquidations physiques extrajudiciaires des personnes soupçonnées d’être des « fellagas » ou de travailler avec eux. Les militaires ont regroupé au village les habitants des quartiers périphériques de Timizar bwafir et de Boudahmane, croyant que de cette façon ils allaient isoler les moudjahidine.

C’est des images qu’on n’oublie pas. Beaucoup de faits et d’évènements de cette dramatique période sont fixés dans des poèmes de l’époque, dits par des poètes et poétesses du village. J’en ai entendu beaucoup à l’époque. Il est peut-être temps que des jeunes du village ou une association se mettent à les recueillir avant que ceux qui les connaissent encore ne disparaissent. Ces poèmes racontent, presque au jour le jour, la dure réalité vécue par le village. Ils constituent un pan important de l’histoire du village et parfois de la région.

C’est en France, à Rouen d’abord, puis à Mantes la jolie et Paris que j’ai fait mes études. Je suis rentré en Algérie en 1966. Je vis et je travaille à Alger depuis cette même année.

Questions 02 : correspondant de la BBC à Alger, reporter et journaliste : quel beau, mais dangereux métier en Algérie!!!

Je suis journaliste depuis 40 ans maintenant. J’ai commencé en 1969. Je suis passé par plusieurs journaux, revues, agences de presse et radios algériens et étrangers. Je suis présentement correspondant de la BBC en Algérie. Le journalisme, un métier dangereux? Surtout durant les années 90.

En l’espace de 5 ans environ, entre 1993 et 1998, il y a eu près d’une centaine de journalistes algériens assassinés, dont certains étaient des amis très proches, tel Tahar Djaout, le premier journaliste écrivain assassiné en mai 1993. Un grand humaniste et aussi un homme d’une probité intellectuelle irréprochable.

Des centaines de journalistes ont fui le pays. Ceux qui sont restés vivaient jour et nuit la peur au ventre. Ils ont été contraints de quitter leurs foyers, d’abandonner leurs familles. Ils vivaient presque dans la clandestinité. C’était terrible.

Menacés de mort par les groupes islamistes armés, ils devaient faire face aussi aux pressions et à la répression des autorités. Des dizaines de journalistes étaient traînés devant les tribunaux et parfois emprisonnés pour avoir publié une information.

Aujourd’hui, la situation s’est quelque peu améliorée. Le journaliste ne vit plus sous la menace des islamistes armés. Mais il est sous la « surveillance » des autorités. Il peut, à tout moment, se retrouver devant les tribunaux pour une banale histoire de diffamation, etc.

Pourtant, la censure est inutile de nos jours. Internet a complètement chamboulé le domaine de l’information et des communications. Une petite manifestation ou émeute dans un coin le plus reculé d’Algérie est immédiatement répercutée, visible sur Internet, avec textes et images à l’appui, grâce au téléphone portable.

Question 03 : vous êtes d’Ait-Bouyahia, mais on ne vous connaît que par vos écrits ou à la radio (chaine II)…

C’est vrai que je ne connais pas grand-chose du village. Depuis 40 ans, je ne pense pas avoir passé une semaine d’affilée au village. Je n’ai pas mis les pieds au centre du village, à ldjama bwada ou ldjama taddart par exemple depuis pratiquement 66. Lorsque je rendais visite à ma famille, je ne dépassais jamais taqqats lekhmis, située à l’entrée du village.

Les hommes de moins de 45, je ne les connais pas tous. Par contre, ceux qui ont mon âge, je les connais. Parce qu’on avait joué ensemble, on allait à la fontaine ensemble et on avait fréquenté, pour certains, la même école coranique. Par la suite, j’ai vécu et côtoyé certains d’entre eux en France, notamment à Rouen où vivait une forte communauté de notre village durant les années 50 et 60.

Question 04 : il était une fois un village nommé Ait-Bouyahia, racontez-nous?

On n’oublie jamais les lieux de son enfance. C’est incrusté pour toujours dans la mémoire. Les meilleurs souvenirs d’une vie sont ceux de l’enfance. J’ai encore en tête tous les lieux et les endroits où j’allais pour jouer, ramener du bois de chauffe, de l’herbe pour mon 4x4 (mon âne) etc. Timizar bw-afir, Lekhmis, Boudahmane, Aman iwraghène, Tizi b-war, Thalemmats, Ighil, Thala g’ifrane, Agouni, Thala tsoukrine, Thala bwadda, Thala oufella et bien sûr Akal Aberkane.

Ce que je garde encore à l’esprit est l’organisation sociale du village : thachemlit (volontariat), les assemblées mensuelles des habitants, thimechret et la répartition équitable des parts de la viande des bœufs sacrifiés.

La meilleure trouvaille concerne la gestion et la répartition de l’eau par famille à l’époque, essentiellement en été. Le matin, on ouvrait les robinets de Thala G’ifrane et l’après-midi ceux de Thala oufella et Thala bwadda. C’était génial. Nos aïeux étaient bien organisés. Ils avaient pensé à économiser et à gérer l’eau, ce précieux liquide, bien avant que les grands pays et les Nations Unies se penchent sur le problème, qui risque de devenir, dans les décades à venir, un problème planétaire.

C’est vrai que nos aïeux n’étaient pas sortis des grandes écoles et universités, mais ils étaient très intelligents et, surtout, réfléchissaient et oeuvraient pour le bien de toute la communauté.

Questions 05 : de loin, de la capitale : comment voyez-vous votre village?

Lorsqu’on ne vit pas au village, il n’est pas facile de savoir ce qui s’y passe. À dire vrai, c’est grâce à ton site que j’arrive à avoir quelques nouvelles du village. Je le consulte presque quotidiennement. Je lui souhaite une longue vie parce qu’il apporte, aux « émigrés » économiques que nous sommes, des nouvelles sur la vie des nôtres et l’évolution des choses au village.

Questions 06 : je ne sais, si vous avez visité le village ces dernières années, mais a-t-il changé de ce vous avez connu (vie sociale, culturelle, artistique, etc.) ?

Les seules informations que j’ai sont celles que je trouve sur ton site. Je ne savais pas, par exemple, qu’il y a une équipe de foot, que des jeunes s’occupent de l’environnement. Je l’ai appris grâce à ton blog.

Question 07 : j’ai créé un Blog sur mon beau village à des milliers de km d’Ait-Bouyahia parce que Thaderthiw c’est ma vie. Vous êtes un des premiers à le consulter et à faire des commentaires : comment l’avez-vous découvert et qu’en pensez-vous?

De par mon travail, je suis branché en permanence, jour et nuit, sur Internet. J’envoie mes articles, chroniques radios, interviews, photos, etc. par le biais d’Internet. Cet extraordinaire moyen de communication est devenu un outil de travail à travers le monde. Tout ce fait désormais par le biais d’Internet : les contacts avec mes responsables à Londres, mes collègues et confrères en Algérie et à travers le monde. Internet a transformé la planète en un village, mieux en un quartier. La preuve ? Moi je vis à Alger et toi à Québec. Il y a une grande distance et un décalage horaire entre nous. Mais Internet a balayé ces deux difficultés : on peut s’envoyer des messages, des images et même se parler grâce à ce prodigieux outil.

J’ai découvert ton blog par hasard. Il est très intéressant. C’est une excellente initiative. Comme la grande majorité des jeunes (garçons et filles) du village sont lettrés -- beaucoup ont fait l’université et les instituts supérieurs -- et savent ce qu’est Internet, ton blog peut jouer – et il le fait déjà puisque nous sommes en contact -- le rôle de trait d’union entre les habitants de notre village, un moyen d’information. En un mot, « d’averrah ttadart ».

Questions 08 :« Il faudra, je pense, ajouter à ton site des nouvelles sur la vie au village : mariages, naissances, décès, les travaux collectifs (htachemlit); sur les sportifs, les chanteurs, les poètes contemporains ou anciens.» Extrait d’un de vos courriels (emails). Je trouve cela comme une excellente idée, mais comment le faire à des milliers de km?

C’est vrai que ce n’est pas facile lorsqu’on est à des milliers de km du village. De plus, tu dois être aussi occupé par la famille, le travail, etc. Et dans des pays comme le Canada, on ne badine pas avec le boulot.

Mais je pense que tu peux alimenter ton blog en faisant appel à tes amis, tes anciens collègues de lycée et d’université, aux jeunes étudiants et étudiantes du village qui poursuivent actuellement leurs études à l’université et dans des instituts d’enseignement supérieur de Tizi Ouzou. Le blog peut devenir, pour eux aussi, un lieu d’échange d’informations, de renseignements et de documentation pour les besoins de leurs études et formations.

Question 10 : notre village est plein de ressources humaines : chanteurs, poètes, artistes, etc., mais ils trouvent de la difficulté à émerger. Votre commentaire…

Un chanteur, artiste peintre ou sculpteur ne peut émerger et s’imposer que par son travail. Par exemple un chanteur qui fait une belle chanson, avec une belle mélodie et un beau texte finira tôt ou tard par s’imposer.

En fait, c’est son travail qui l’imposera aux mélomanes et auditeurs. Les artistes et musiciens doivent constamment être en contact avec les gens des médias (journalistes de la presse écrite, producteurs d’émissions radios, etc.). C’est d’abord à eux de faire la promotion de leurs produits, en s’approchent des journalistes, des producteurs et animateurs radio, et en organisant aussi, pourquoi pas, des ventes dédicaces dès la sortie d’une cassette ou d’un CD.

Chanter, c’est bien. Mais le faire connaître, c’est encore mieux.

Il est vrai aussi que les éditeurs ne jouent pas le jeu. Ils sont responsables de la médiocrité actuelle de la chanson kabyle. Ils encouragent des chansons du genre « non stop » qui ne vivent que le temps que dure un cornet de glace. Certains appellent ce type de produit « chanson glace » d’ailleurs.

Les artistes ne doivent pas se décourager. Les vrais finiront par reprendre les commandes de la chanson et de la musique.

La daîra de Beni Douala compte de nombreux talentueux. J’en ai vu quelques-uns ces derniers à Alger. Elle compte aussi de grands chanteurs, parmi eux Chérif Hamani, Zedek Mouloud et bien d’autres. Ces artistes doivent prendre l’initiative de se regrouper dans une association au niveau de la daïra pour, entre autres, proposer et donner des concerts, organiser des ventes dédicaces etc.

Question 11 : C'est terrible de voir nos jeunes partir avec l'idée de ne plus revenir, le village se vide. Que dire?

Ce drame, parce que c’en est un, démontre la faillite d’un système politique, l’incompétence des dirigeants qui se sont succédé aux rouages de l’État depuis 1962. Beaucoup croient que c’est le chômage qui fait fuir nos jeunes. C’est complètement faux. C’est aussi et surtout la « hogra », l’injustice, l’absence de liberté, la corruption, la mal vie… Parmi les « haraga » interceptés en haute mer ces derniers mois figurent des fonctionnaires, des médecins, des étudiants, des gens qui gagnent bien leur vie, comme on dit.

Un jeune a besoin de vivre, d’aller au cinéma, de danser, de boire une bière, d’aller à la mosquée, de marcher avec une copine dans la rue ou de s’asseoir avec elle dans un jardin public sans être embêté par un agent de police qui viendrait leur demander s’ils sont mariés.

Question 12 : vos meilleurs moments à Ait-Bouyahia?

Généralement, on ne vit que de meilleurs moments durant son enfance et on en oublie rapidement les mauvais. Selon des périodes, une partie de jeu de savate (tiqqar), aux billes, la pose de pièges pour étourneaux, la cueillette des cerises étaient des moments merveilleux pour les bambins de notre âge. On arrivait même à transformer les corvées d’eau, de bois en parties de plaisir. D’ailleurs, il n’y avait rien d’autre à faire à la sortie de l’école coranique.

Question 13 : un endroit magique au village?

Taqaats lekhmis. Surtout le petit cimetière qui a été rasé pour agrandir la placette. C’était l’endroit le plus frais du village en été.

Question 14 : thimechret, thachourt, etc. ces traditions et coutumes ancestrales vous les avez vécus et vous les voyez comment, aujourd’hui?

J’aime bien les fêtes traditionnelles. Thimechret est une tradition très ancienne. Elle existe dans de nombreuses régions de Kabylie. Le sacrifice de plusieurs bœufs et veaux permet à tous les habitants d’un village, qu’ils soient riches ou pauvres, de manger le même jour de la viande à satiété. Une belle trouvaille.

Au-delà de leur côté religieux, qui n’est d’ailleurs pas très apparent, thachourt et elmouloud sont des fêtes qui permettent aux gens de différents villages et régions de se connaître, de lier des liens amitiés, de nouer des liens de mariage, de frotter ses connaissances et son savoir à ceux des autres, de suivre l’évolution des comportements, des mentalités, des coutumes…

Question 15 : thalla iguefrene, ldjamaa bwada, akal aberkane, etc. que vous rappellent-ils?

Les images de ces endroits sont incrustées pour toujours dans ma tête. Je les vois maintenant comme des endroits magiques. Et ils l’étaient autrefois.

Question 16 : beaucoup de coutumes disparaissent du village, qu’en pensez-vous ?

Ainsi va la vie. Certaines coutumes et traditions disparaissent, d’autres évoluent. Permettez-moi de reprendre ici un extrait d’un article que j’ai publié en février 2009 dans la revue algérienne Le Cap sur justement les coutumes et les traditions orales :

« C'est enfoncer une porte ouverte que d'écrire que la littérature orale, qu'on appelle aussi la tradition orale, a perdu du terrain. Elle en perd chaque jour un peu plus (…). Les veillées autour de l'âtre, près du feu, n'ont plus cours. Elles sont «hors champ», pour reprendre une expression à la mode depuis l'arrivée du téléphone portable en Algérie. Elle n'a pas résisté à l'irruption de la télévision et des autres outils et moyens de communication modernes.

«Saraha raha», «Alhane wa chabab» de la télévision algérienne et les nombreux programmes, émissions, reportages, magazines «servis» sans interruption, de jour comme de nuit, parfois en direct, par les dizaines, voire les centaines de télévisions émettant à travers la planète ont écarté, isolé, voire tué culturellement les conteuses et les conteurs. Les grands-mères ne trouvent plus, à leur côté, en face d'elles, leurs petits-enfants à qui raconter une belle histoire, un magnifique conte. Elles disparaissent en emportant avec elles les trésors ancestraux.
Même s'ils le désirent, les enfants, ballottés le soir entre les leçons et les devoirs scolaires, ne disposent plus de temps pour écouter des contes et autres récits épiques. Même lorsqu'ils disposent d'un court temps libre, ils préfèrent se mettre devant la télévision et regarder les programmes. Et ce n'est pas le choix qui manque. Il y en a pour tous les goûts et pour tous les âges.

«Chaque fois qu'un vieillard meurt en Afrique, c'est une bibliothèque qui brûle», disait l'écrivain et ethnologue malien Amadou Hampâté Bâ (…). Les berceuses, récits, épopées, contes, comptines, proverbes, mythes, légendes, fables et devinettes n'ont plus voix au chapitre.

Les savoureuses veillées au coin du feu en hiver et sur la petite courette de la maison (lhara) en été font partie de l'histoire ancienne. Les moments de communication entre générations sont devenus très rares. Le téléphone portable a réduit comme une peau de chagrin les contacts directs entre les membres d'une même famille et les amis.

Le SMS tend à remplacer «aberrah» (le crieur public) puisque, parfois, les avis de décès sont envoyés par le biais de ce nouveau moyen de communication, dans un message sec et froid. La même démarche commence, petit à petit, à s'installer concernant les condoléances. C'est la rançon du progrès, dit-on. De là à considérer la littérature orale comme une tradition «hors course», voire absurde, il n'y a qu'un pas. Déjà, certains jeunes et adolescents qualifient de «périmés» des pans entiers de la tradition orale.
Pourtant, cette littérature orale a joué, autrefois, un grand rôle dans la structuration, l'éducation, la formation, le développement et la socialisation de l'enfant. C'est la masse des savoirs, des connaissances, des valeurs et des référents, acquis auprès des siens par le biais de l'oralité, qui permettait de passer de l'enfance à l'âge adulte. Cela se faisait sans trop de difficultés parce que l'enfant était bien armé, culturellement et intellectuellement, pour une telle évolution. Il était assez bien «outillé» pour développer de bons rapports avec ses semblables, la nature et l'environnement. Tout le monde était impliqué, à des degrés divers, dans la transmission, le transfert du savoir et des connaissances ancestrales à l'enfant »

http://www.blogg.org/blog-57499-billet-litterature_orale___elle_se_perd-978772.html

Autrefois, il y avait un code de conduite, une réglementation stricte qui régissait l’organisation sociale du village. Une bagarre entre deux personnes, des insultes, se balader avec un poste radio allumer dans le village, monter sur son âne sur les chemins étroits du village et des fontaines, s’absenter à l’enterrement d’une personne du village étaient sanctionnés par des amendes. Je ne sais pas si cette organisation existe encore ou non. Elle était nécessaire à l’époque.

Autre exemple : dès qu’une figue fraîche est cueillie par un habitant, le village prononce, le lendemain, une interdiction de cueillette des figues pendant 15 jours. Je n’avais jamais compris pourquoi. Mais avec le temps et l’âge, on comprend mieux ce qui se faisait pendant notre enfance. C’est, finalement, cette mesure qui nous permettait de manger des figues sèches durant les autres saisons de l’année. D’autant que les gens n’étaient pas riches.

Question 17 : Un souvenir ou quelque chose qui vous tient à cœur (en rapport avec le village) …

Thimechret et la fête de thachourt à Akal aberkane.

Question18 : un personnage ou des personnages qui vous ont marqué?

Il y’en a beaucoup. Aussi bien des hommes et des femmes. Celui qui me revient chaque fois à l’esprit, c’est Moh Ath Belaïd, le crieur public. C’est lui aussi qui était chargé de la surveillance des fontaines du village et de la répartition de l’eau en été. Je ne l’avais jamais vu énerver, crier, plaisanter, discuter trop longtemps avec les autres. Il vivait presque à l’écart de la communauté. C’était un grand Monsieur.


Question 19 : votre mot de la fin.

J’aimerais faire deux choses : 1) - réaliser un documentaire/reportage sur l’organisation sociale du village jusqu’au début des années 70, et 2) – collecter tous les poèmes écrits et dits par les poètes et poétesses du village, notamment durant les années 40 sur la 2ème guerre mondiale et ses conséquences sur la population, les années 50 sur la guerre d’indépendance et ses conséquences, et les années 60 sur l’indépendance et l’immigration.

Mes sincères remerciements


1 commentaire:

Unknown a dit...

Bonjour,
En 1953 et 1954, j'étais instituteur à Ait-Bouyahia aussi j'ai été intéressé par l'interview
très riche de Mohamed Arezki Himeur, paru en 2009. J'ai gardé personnellement de mon court séjour dans ce village un excellent souvenir avec des élèves attachants qui avaient une grande
soif d'apprendre. Les conditions matérielles étaient pourtant difficiles avec deux groupes de
60 élèves intervenant alternativement dans l'unique salle de classe de l'école. Ma pensée est revenue et revient très souvent vers ce beau village de Kabylie. Maurice Doassans