vendredi 18 septembre 2015

Il ne s'agissait nullement d’un récit d’aventures imaginaires.....

Rachid Kechad.

En cette période estivale, les fêtes de mariages, de circoncision, etc... se succèdent l’une après l’autre, à une fréquence continue. De nos jours, il est courant d’avoir plus d’une quinzaine de fêtes par mois dans le village. Les fêtes ont déjà atteint leur apogée avec leur lot d'animation et d’emballement. Cette fois ci, j’essaierai de déterrer un lointain souvenir qui remonte à un certain mois de Mai de 1970. Il ne s'agissait nullement d’un récit d’aventures imaginaires, ou d’un conte de fée, mais d'une histoire réelle, trop réelle même. En effet, certains doux souvenirs enfouis au fin fond de nos mémoires finissent toujours par remonter en surface comme l’eau confinée dans la roche. Un événement de cette envergure mérite bien d’être évoqué et raconté de façon à faire voyager les nostalgiques dans le vieux temps et, de faire un état descriptif pour permettre aussi, aux jeunes générations, de vivre de par ce récit, le déroulement et l’enchainement de cette mémorable cérémonie.
A l’occasion de la circoncision de Hasdane Karim, son père Mouh Dhel Mouloud Ikavichen, a organisé un gala majestueux, auquel une pléiade de chanteurs de renom était au rendez-vous où, presque l’équipe de l’ex « RTA »s’est déplacée à El Djemaa Bouwada, Parmi ces artistes et chanteurs, je peux citer quelques-uns : Maati Bachir, Mahboub Batti, Taleb Rabah, Djamila, Anissa, El djida Tamachtouhth et Mohand Rachid, qui sont tous ravis de se joindre à cette célébration harmonieuse. Pour satisfaire le large public, les organisateurs ont concocté un programme riche et varié qui prévoit, le passage, à temps égal sur scène, de l’ensemble des chanteuses et chanteurs invités.
Plusieurs semaines avant le jour “j”, la mère de famille a fait appel aux femmes de sa famille et à celles de ses voisins pour venir rouler le couscous. C'est avec ce couscous que la famille préparera le festin qui sera servi aux gens du village ainsi qu'aux invités .Il leur a fallu plusieurs jours pour que cette tâche soit terminée. La veille de la cérémonie, les femmes d’un certains âges étaient astreintes à passer une nuit blanche à apprêter les légumes et autres ingrédients pour la préparation du repas du lendemain. Très tôt le matin, le cuisinier homme était déjà à pieds d’œuvres, torchon déposé sur l’épaule droite, pour entamer les préparatifs du bouillon de légume pour le repas prévu à partir de midi. A l’heure indiquée, la sauce était déjà prête à être servie. Les invités arrivèrent par petit groupe où deux grandes chambres dans son domicile familial étaient aménagées pour les accueillir. Les hôtes se mettent à table pour se rassasier de l’incontournable couscous garni. Selon certaines indiscrétions, un groupe de quinze jeunes suédois en visite dans la région des Ath D’ouala, ont été conviés à déguster le succulent couscous bien garni aux légumes frais et à la viande rouge. Ces jeunes ont agréablement apprécié le geste et le repas. Après de nombreux services copieux, tous les convives, hommes, femmes et enfants ont mangé à satiété. Sitôt le banquet terminé, les tables sont débarrassées et les salles nettoyées. A fin d’éviter l’effet de surprise, le responsable de la cuisine (K. ch) avait pris la précaution de réserver une table à manger dans le coin, aux éventuels retardataires.
D’habitude, la célébration des fêtes se déroulent et s’organisent dans les domiciles familiaux. Dans le souci de mettre à l’aise les foules venues nombreuses de tous les coins de la commune et, en dérogation à la règle cette fois-ci, la place d’El Djemaa bowada était le seul endroit approprié, susceptible d’accueillir tant de gens. 

Pour donner des couleurs traditionnelles, les fameux « Idhebalen » groupes de musique traditionnelle kabyle (les joueurs de tambours) ne sont pas oubliés. Ils ont fait de l’animation durant deux jours de suite. Le petit cercle des danseurs est souvent traversé par quelqu’un qui exhibe, par-dessus sa tête, d’un geste presque ostentatoire, le billet qui ira rejoindre ses semblables glissés dans le turban déjà garni du joueur de tambour. En plus de ce que le père de famille leur a promis, certains arrivent à récolter de belles sommes que les gens se font un honneur d’offrir, en incitant les autres à les imiter.
Au niveau de la placette « El Djemaa Bouwada »La mise au point de la scène était à ses dernières retouches pour quelle soit fin prête à 21 heures précise. Pour l’occasion « Thachouchth Ah’dhelhadj » qui est un espace public couvert où des individus se rencontrent en tous temps et en toutes saisons, est aménagée en vestiaire, pour donner la possibilité aux artistes de changer leurs tenues vestimentaires.
En l’absence d’énergie électrique à cette date, et pour y faire face, il était dans l’obligation de faire recours à un groupe électrogène de grande capacité et de forte puissance pour alimenter la sonorisation professionnelle et tout l’éclairage intérieur et extérieur. Le long du chemin menant du quartier Ikavichen jusqu’à El djemaa Bouwada, sur une distance approximative de 300métres, était éclairée et ornée par des guirlandes lumineuses. L’entretien des installations électriques, de la sono et du groupe électrogène, fut confié durant toute la soirée à un célèbre électricien du village voisin de Taderth Ouffela. Il avait accompli sa mission sans faute.
Un dispositif de sécurité constitué de sages bénévoles était mis en place pour garantir la sécurité des personnes et de contrôler au peigne fin les endroits réservés aux femmes. Ainsi, tous les passages menant vers Azroug Imaren, Azroug Nath yahia et le chemin vers Takarbth étaient sous une bienveillante surveillance. Pour en avoir le cœur net, des hommes de confiance ont été placés dans les endroits à risque. La tolérance zéro doit être et sera le maître mot durant toute la période de la fête.
Vava salah Halata, a ajouté de la saveur à l’ambiance conviviale qui régnait déjà, il a trouvé bonne occasion en improvisant une buvette temporaire au niveau n’aami Messaoud. Les présents venus assistés à la fête, peuvent s’acheter de la limonade de marque ‘’Hamidi’’, contre une pièce de monnaie de un dinar, comme ils ont la possibilité de prendre un café ou bien un thé pour stimuler l’organisme pour rester bien éveillé toute la nuit. Ce commerce de fortune mis en place avec des moyens rudimentaires, constitue pour lui une bonne affaire pour ramasser un peu d’argent.
Tour à tour, l’animatrice annonce à grande pompe le nom du chanteur ou de chanteuse. La foule s’embrase et les grandes acclamations se font entendre à des centaines de mètres à la ronde. La musique rythmée très intense dégagée par les amplificateurs enflamme davantage les participants. Les cris de joie ne manquaient pas et tous les amis et autres convives lancent des «mabrouk» à l’enfant circoncis et au papa. Les gens de condition aisée s’empressent volontiers à remettre quelques billets à l’heureux enfant à titre d’offrande.
La gestion de cet événement grandiose, était du ressort exclusive de Mouh Dhel Mouloud Ikavichen, il était sans contexte, l’élément central et prépondérant, c’est lui qui dirige, oriente, décide, ordonne, active, surveille, veille et observe. Il voit tout et, rien ne doit lui échapper.
Les animateurs avaient concocté un programme riche et varié, avec au menu de la musique, de la chanson kabyle, du chaabi et de la danse. C’était vraiment des moments forts et magiques, l’assistance s’était bien amusée à souhait pendant les quatre heures de bonheur inoubliable. A minuit, la fête battait son plein, quand un appel urgent, venait d’un haut parleur, annonçant l’absence inexpliquée d’un petit garçon (Ch-I). Tout le monde était pris de frayeur, sa mère en pleur commença à s’inquiéter. La fête est momentanément suspendue, et instantanément des recherches ont été déclenchées pour retrouver l’enfant, Quelques minutes plus tard, plus de peur que de mal, l’enfant est de nouveau dans les bras de sa maman et la fête reprend de la plus belle manière.
A l’annonce de L'artiste-chanteur Taleb Rabah, l’un des piliers de la chanson kabyle, qui nous a gratifiés, entre autres, par ces remarquables chansons :lfouk zith d'ilmasbah (la chandelle n'a plus d'huile) et « Tsnadigh afazahriw (je cherche ma chance). A ce moment précis, les jeunes ont transformé la fête, en un défouloir, avec et en raison de la marée humaine, il n’était pas du tout aisé pour les accros de la danse de se frayer un chemin à travers la foule mouvante pour parvenir dans le cercle des danseurs. L’un après l’autre, Chanteuses et chanteurs se sont tous succédé sur scène pour interpréter avec art leurs derniers tubes à succès. Djamila, Anissa et Djidda thamachtouhth, en signe de reconnaissance, l’assistance notamment féminine, a lancé à gorge déployée des youyous de bienvenue et d'admiration. Certes, les deux premières chanteuses n'ont pas fait danser le public. De par leurs paroles sentimentales et sincères, elles ont permis au public de plonger dans la méditation. Les thèmes des chansons proposées se sont adressés au cœur et non au corps, tel que « Anda Al3adh Ithafkidh »d’Anissa. Mohand Rachid, avec sa mythique chanson « Aya fellah Ikarzen » avait obtenu un grand succès dans les années 1960 en se lançant dans une carrière de chanteur kabyle et Chabbi. De par ses belles chansons à texte, sa voix suave et un style propre à lui, il a enchanté et émerveillé, pendant plus de 30 minutes, les nombreux admirateurs. Pour achever le spectacle en apothéose, El Djida Thamachtouhth n’a laissé personnes indifférents y compris les plus tenaces avec l’extraordinaire chanson « Win azizen », tout le monde s'est lâché, car avec une telle ambiance, il n'était pas question de rester calme, vraiment, c’était une scène presque en délire. Aux environs de deux heures du matin, le célèbre eternel couplet de « Abkaw ala khir » chanté ensemble pour donner le signale de la fin de cette soirée unique et sans précédent, où tous les présents avaient agréablement passé des moments plaisants et inoubliables. Les organisateurs, chanteurs et les bénévoles se sont mêlés pour ranger les instruments de musique et les bagages dans le coffre de la Peugeot 403 berline appartenant à Taleb Rabah, pour rejoindre sans tarder Alger, la capitale.
Bravo tout le monde et Mille Merci I-vava El Mouloud, de nous avoir permis de vivre cette exceptionnelle et gracieuse fête.
Mes félicitations pour toutes les cérémonies de circoncision des petits.
Je profite aussi de l’occasion pour souhaiter mes vœux de bonheur aux nouveaux mariés, ou Lakouva ikounamthi okdh nithni. Merci.

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